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Personne ne demande jamais rien aux citoyens

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« Les citoyens sont plutôt les objets que les sujets de la création de politiques. Le public ne participe pas concrètement à la prise de décisions. Il y a très peu d’initiatives citoyennes authentiques dont une partie d’entre elles est politiquement motivée. »
 
Ce sont les conclusions tirées par une partie des experts dans le cadre du projet « Miroir du Gouvernement : participation du public dans l’élaboration des lois », mis en place par le Centre macédonien de coopération internationale et le Réseau pour le développement de la société civile dans les Balkans, dont les sièges se trouvent à Skopje. Ces experts ont analysé, dans la période de mars à octobre 2012, 157 propositions de loi publiées dans le Registre électronique national de réglementation et sur les sites web des ministères. Presque deux tiers de toutes ces lois ont été directement annoncées une fois adoptées par le Gouvernement. Ce qui veut dire que le public n’a pas pu intervenir pour les modifier. De plus, seulement 6 commentaires ont été déposés par le public concerné portant sur certaines de ces lois.
 
Mirjana Najčevska, expert en droit auprès de l’Institut de recherches sociologiques et politiques de Skopje, constate : « Les citoyens ne peuvent aucunement influencer les décisions et les politiques adoptées. Il n’existe aucun mécanisme ni procédure qui laisserait la porte entrouverte à l’engagement civil. L’Assemblée et le gouvernement ne participent pas non plus à la prise de décisions. En effet, ce n’est qu’un cercle étroit de politiciens qui prend des décisions qui sont ensuite adoptées formellement. »
 
Les citoyens – « clients » du parti de l’opposition et du parti au pouvoir
Ilija Acevski de l’Institut national de sociologie ajoute : « Dans une société politisée, les partis politiques assument le rôle principal et créent tout. Par conséquence, le citoyen n’existe pas ou il est pressé au maximum comme s’il n’existait pas. Comme la situation se politise et le totalitarisme prend racine, les initiatives civiles, les droits et les libertés des citoyens diminuent de plus en plus. Les citoyens sont transformés en « clients » soit par le parti de l’opposition soit par celui au pouvoir mais le plus souvent par les institutions. Donc, c’est l’État qui imagine et impose des solutions tandis que les citoyens les acceptent et les mettent en place. Les citoyens n’ont pas de droits et de libertés, l’espace tellement réduit ne leur permet pas d’initier quoi que ce soit. »
 
Ibrahim Mehmeti, analyste politique indépendant de Skopje, confirme : « Quant à l’engagement civil, surtout par rapport à la création de politiques et de lois et à d’autres questions plus systématiques concernant le pays entier, on constate une véritable inertie. Cet engagement est un peu plus visible au niveau local mais toujours loin de ce qu’il devrait être dans un pays démocratique où les citoyens feraient partie de la prise de décisions et de la création de politiques, et ne seraient pas que des « spectateurs » ». 
 
La proposition de l’initiative civile « AMAN », cherchant à modifier la loi sur la question énergétique et à diminuer le prix de l’électricité, a été récemment rejetée par l’Assemblée malgré que 13.000 citoyens aient signé la pétition. On entend désormais parler d’une nouvelle pétition visant à rassembler 150.000 signatures.
 
 
Les structures au pouvoir ne possèdent pas assez de capacités démocratiques
Les initiatives civiles, pourquoi apparaissent-elles ? Sont-elles acceptées ?
 
« On accepte les initiatives qui ne s’opposent pas à la politique générale du parti au pouvoir. Si celui-ci ne possède pas de grande capacité démocratique, il ne pourra jamais ni dépasser ses valeurs et ses attitudes politisées et étroites, ni accepter tout ce qui ne correspondra pas à ses politiques et idéologies. Cela explique le petit nombre d’initiatives civiles qui sont très souvent en opposition avec les attitudes promues par les structures au pouvoir en général, peu importe s’il s’agit de la gauche ou de la droite », estime Mehmeti.
 
« Les initiatives civiles doivent jouer le rôle de contrôleur, d’une digue contre l’autocratie des autorités. Même si elles sont à leurs débuts, de telles initiatives existent et peuvent se développer considérablement. La question n’est pas de savoir si des initiatives existent mais s’il y a une structure démocratique de l’autre côté prête à réagir à ces initiatives et à faire des changements. Les citoyens peuvent tout faire aujourd’hui, même sortir nombreux dans la rue mais cela ne changerait rien », souligne Najčevska.
 
Cependant, le nombre d’organisations civiles est en hausse : jusqu’à 2010, 11.457 organisations ont été enregistrées, dont la plupart étaient des associations de citoyens et des fondations. A ce jour, 3.732 se sont enregistrées de nouveau.
Estimant qu’il n’existe toujours pas d’initiatives civiles authentiques, Acevski signale :
« Ce qui est terrifiant, c’est justement cela. Même l’État forme des ONG pour créer l’illusion de l’opposition et de la démocratie. Dans sa « Stratégie de coopération avec le secteur civil jusqu’à 2017 », le Gouvernement a proclamé que « la transparence et l’inclusion citoyenne sont des facteurs importants puis qu’ils encouragent la responsabilité, la reddition de comptes et la promotion de l’innovation et du développement ». Le temps dira si la stratégie sera mise en place dans les cinq prochaines années comme prévu ».
 
Français
08.03.2013
Source: Deutsche Welle

 

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