La pollution du Vardar atteint un niveau alarmant

Depuis des années, la pollution du fleuve Vardar est alarmante mais invariable. Il n’existe pas de monitoring continu ni de stations de filtration dans les villes. Les usines polluantes sont équipées de mécanismes de filtration mais ils ne fonctionnent pas.   

 

La chanson « Hé Vardar, toi, tu embellis la Macédoine » est depuis longtemps fausse tant les eaux du plus grand fleuve macédonien sont terriblement polluées. Au cours des cinq dernières décennies, il n’y a pas eu de meilleur exemple de l’insouciance humaine que le fleuve Vardar.

 

Les analyses faites par l’Institut de la santé publique de Veles et par plusieurs institutions compétentes qui prélèvent des échantillons d’eau pour analyse une fois par mois, placent le Vardar au niveau 4 selon la qualité bactériologique et aux niveaux 4 et 5 selon la qualité physique et chimique.

 

Vera Ristova, spécialiste en hygiène auprès de l’Institut de la santé publique de Veles, aujourd’hui retraitée mais qui a fait ces analyses pendant longtemps, explique :

« Tout au long de son cours, de Skopje jusqu’à Veles, les eaux de Vardar appartiennent à la classe 4 selon la qualité bactériologique, c’est pourquoi la baignade, l’arrosage et l’abreuvement du bétail sont interdits. Même selon la qualité physique et chimique, c’est-à-dire selon les niveaux de turbidité (caractère trouble de l’eau), de particules suspendues, de nitrates, de nitrites et de matières organiques, le Vardar appartient aux classes 4 et 5 », avertit Ristova.

 

Dix à douze fois par an, la qualité des eaux du Vardar est également suivie par l’Institut hydrométéorologique (UHMR) via six points de surveillance mis tout au long du fleuve. Les résultats sont les mêmes.

 

Il n’existe pas de monitoring continu et ce qui est même plus inquiétant, c’est qu’il n’existe pas non plus de stations de filtration tout au long du fleuve. Les experts en écologie alertent sur le fait que les usines, en tant que plus grands polluants, sont obligées par la Loi sur les eaux d’avoir une station de filtration fonctionnelle, ce qui n’est pas toujours le cas.

 

Certains experts ont quelquefois analysé la qualité des eaux du Vardar, soit indépendamment soit dans le cadre de projets sur le sujet. Le professeur Svetislav Krstić de l’Institut de biologie au sein de la Faculté des sciences mathématiques et naturelles de Skopje, a fait, il y a une dizaine d’années, des analyses complètes des eaux du Vardar dans la région de Veles. Tenant compte de ses résultats, il remarque :

« Ma constatation est que le niveau de pollution catastrophique du Vardar est encore vrai aujourd’hui même si une partie des métaux lourds n’est plus présente, comme le mercure, le fer et le manganèse. Cela s’explique non par la filtration de l’eau mais par la fermeture de l’usine de fabrication de détergents OHIS et de la Fonderie de Veles ».

 

De plus, il souligne : « L’un des polluants les plus dangereux sont les eaux d’écoulement brutes de l’Usine d’huile alimentaire, qui contiennent des matières organiques graisseuses difficilement dégradables. Par conséquence, la mortalité massive de poissons et d’alevins dans la région de Veles est un phénomène assez fréquent ».

 

Dans la réponse écrite officielle que Deutsche Welle a reçue sur ce sujet, le Ministère de l’Environnement annonce un projet concernant le fleuve Vardar :

« Soutenu par la Commission européenne, au cours des six prochaines années, ce projet visera à améliorer l’état sanitaire des cours d’eau autant concernant le caractère potable de l’eau que pour les usages récréatifs et le biotope qui y vit. L’adoption d’une  méthodologie sur le prix de l’eau assurera la durabilité et la fonctionnalité des entreprises publiques », lit-on dans la réponse écrite du Ministère.

 

De plus, le Ministère « travaille sur l’identification des agglomérations et des régions fragiles pour pouvoir élaborer un Plan de gestion des eaux usées en Macédoine. La méthodologie concernant les sites prioritaires pour la mise en place des stations de filtration est déjà prête. Soutenue avec des fonds d’IAP, cette étape nécessitera une bonne communication et coopération parmi toutes institutions gouvernementales et non gouvernementales. Conformément à la Loi sur les eaux, le Ministère est en train de mettre en place une station de filtration à Gevgelija grâce à l’aide financière des gouvernements suisse, macédonien et grec ».

Par Antoanela Dimitrievska